Histoire

Petite histoire de la démographie parisienne

Ville la plus peuplée de l’occident médiéval, Paris fut longtemps un véritable monstre démographique, dépassée au temps de la modernité par les mégalopoles asiatiques ou américaines. Une histoire marquée par de nombreuses fluctuations, entre guerres civiles, épidémies, migrations et revitalisations.

On ne dispose d’aucune base certaine pour estimer la population parisienne avant la date de 1328. À l’époque romaine, des chiffres, incontrôlables, évalue celle-ci entre huit et vingt mille habitants, le premier étant probablement le plus proche de la réalité. Par la suite, la régression du rôle politique de Paris sous Charlemagne et les menaces normandes des 9e et 10e siècles ont certainement eu un impact négatif sur l’évolution de la population.

On connait en revanche assez bien le Paris de la fin du 12e siècle, pendant le règne de Philippe-Auguste. Paris, dont le rôle de capitale se précise, est alors la plus grande ville d’Occident. On passe d’environ 25 000 habitants en 1180 à une cinquantaine de milliers en 1220.

Chocs démographiques

Le premier document statistique que l’on connaisse est l’état général des feux dressé en 1328 à des fins fiscales. Paris a alors 61 098 feux. Rappelons qu’un feu, c’est une famille faisant feu commun. D’où l’appellation, toujours actuelle, de foyer ! Mais ce que ne nous dit pas ce document, c’est de combien de personnes se compose chaque feu… Car il peut aller d’une large famille d’une quinzaine de membres – sans compter les domestiques – à un célibataire compté pour un feu. Plusieurs estimations ont été tentées d’après ce chiffre, et celle d’environ 200 000 habitants est aujourd’hui la plus largement retenue.

À titre de comparaison, à la même époque, Venise, Gênes et Florence comptent 100 000 habitants et les grandes villes françaises recensent au maximum 50 000 âmes. Paris est un monstre démographique, où l’expansion , démesurée, se fait dans un espace clos par une enceinte militaire. La Peste noire de 1348 n’aura que peu d’impact sur la population, rapidement remplacée. C’est pendant la guerre de Cent-Ans, et le conflit entre Armagnacs et Bourguignons, que Paris connaitra son plus fort choc démographique.

Dans les années 1420, Paris ne compte plus qu’environ 100 000 habitants, soit la perte de 50% de sa population. La ville est isolée, ses mouvements commerciaux paralysés, entrainant une hausse des prix incontrôlable. Du côté des possédants, les loyers impayés entrainent un abandon de l’habitat. Même le roi et la cour ont abandonné la capitale. Bref, Paris est invivable, et ne retrouvera son niveau de population d’avant guerre que vers 1500 (soit 80 ans plus tard !). À la mort de Charles IX, en 1574, on estime la population parisienne à environ 350 000. À titre de comparaison encore, à cette même époque Rouen compte 50 000 habitants, Lyon 100 000 et Milan 180 000.

Les limites de Paris du IVe siècle à aujourd’hui

Une inexorable croissance

Sous Louis 14, Paris dépasse les 400 000 âmes. Le premier recensement, en 1796, nous donne le chiffre de 556 000 habitants. Soit cinq fois plus que Lyon, Marseille ou Bordeaux, et dix fois plus que Lille. Après la Révolution, et au cours 19e siècle, Paris ne cesse de grossir. Dans les limites du Paris actuel, on compte 550 000 habitants en 1801, 700 000 en 1817 et le million est atteint vers 1845. La croissance s’accélère sous le Second Empire avec 1 280 000 habitants en 1851,  et 1 850 000 en 1870, soit une augmentation de près de 50% en vingt ans. Une évolution qui s’explique naturellement par l’urbanisation des faubourgs annexés en 1860.

Le mouvement continue après la Commune de Paris : les 2 millions d’habitants sont atteints en 1877. En 1899, il y a 2 500 000 habitants, 3 800 000 en 1906 et 4 150 000 en 1914 ! Si le sujet n’est pas traité ici, cette augmentation s’accompagne évidemment par une urbanisation massive de la banlieue parisienne. En 1900, l’agglomération est, avec 9,3 millions d’habitants, la troisième du monde, après Londres et New-York.

Les guerres mondiales, les transformations des surfaces habitables (notamment une part de plus en plus importante de bureaux) ainsi que l’essor des banlieues attirant les jeunes familles modifieront le paysage parisien au cours du 20e siècle. En 2024, 2 087 600 personnes habitent à Paris.

Infos Utiles

Chiffres tirés de Paris, deux mille ans d'histoire, Jean Favier, éditions Fayard.

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